Entreprise 2.0 : « it’s easy try it »

La semaine dernière, le 25 juin Marc de Fouchécour et Richard Collin réunissaitaux Arts & Métiers Paristech une centaine de professionnels, dont nous, pour échanger sur les enjeux et les transformations en cours dans l’entreprise 2.0, à la suite de leur participation à ‘‘Enterprise 2.0 Conference » à Boston.

Cette rencontre était importante, car elle a montré qu’au moment où lesentreprises françaises doutent de l’importance de l’usage des outils web 2.0 et surtout des modes de management inhérents à ces outils, des représentants des grandes entreprises du monde entier étaient présents pour apprendre, comprendre et présenter les transformations en cours dans leurs entreprises. Nos hôtes présents à Boston ont ainsi pu remarquer que les français et leurs entreprises n’étaient quasiment pas représentés, bien que cette conférence existe depuis 3 ans, et que l’on constate une forte accélération de cette thématique dans les grands groupes américains depuis 12 mois. Alors que les entreprises françaises considèrent que « le Web 2.0 reste encore un concept très marketing », les entreprises américaines ne se demandent plus pourquoi elles franchiraient le pas, mais bien comment le faire.

Nous allons voir ici, comment et pourquoi de grandes organisations ont évolué vers l’entreprise 2.0

Ainsi, Fedex privilégie de plus en plus les services et la rapidité en passant à une organisation en réseau. Pour le DSI, c’est cette rapidité qui compte, et non pas la question de la sécurité qui est secondaire. C’est plutôt rare d’entendre le service informatique prôner cela. En fait, la véritable idée repose non pas sur une sécurité renforcée à tous les niveaux, mais le respect des règles du jeu par les collaborateurs. Pour y arriver, le temps partagé de façon collaborative est le moyen le plus sûr.

Même une organisation réputée cloisonnée comme la CIA s’y est mise. : Elle considère qu’elle doit devenir imprévisible, comme ses ennemis, et cela passe par plus de souplesse, notamment concernant l’échange d’informations. Elle a mis en place un wiki avec seulement trois niveaux d’accès (ultra-secret, secret et sensible) où toutes les informations sont stockées. Les informations sont classées par thèmes et non par organisations ou directions. Tout se fait dans le wiki, ce n’est donc pas un travail supplémentaire. Les « mises au point » se font dans l’outil, de façon asynchrone, sans réunion ou workflow supplémentaires. D’autres outils, comme des outils de partage de documents, galeries de photos, vidéos.. sont aussi présents en interne pour partager les connaissances au sein de la communauté CIA. Les frontières internes explosent, mais les externes demeurent. La CIA considère qu’il y a eu plus d’erreurs liées au cloisonnement intérieur qu’aux fuites externes.

Dans le même genre d’organisation « fermée », Lockheed Martin est une société aéronautique, spécialisée notamment dans les avions militaires et elle est un des principaux fournisseurs du Pentagone. Autant dire qu’on trouve en son sein de nombreux militaires et qu’on ne badine pas avec la sécurité, la hiérarchie et la discipline. Pourtant elle a lancé le projet « Unity » visant à amener ses collaborateurs à échanger pour partager des expertises différentes, faire connaître son travail et le faire progresser grâce au contribution de chacun. Pour Lockheed Martin, le but est de sortir du cercle vicieux, email, réunion, powerpoint. Ils ont donc mis en place un nombre importants d’outils sociaux. Le but étant de rendre ces outils indispensable au quotidien, sans ajouter de tâches supplémentaires. Pour cela il y a eu un très fort investissement du top management, qui souhaitait aller vite pour éviter un effet tunnel et ainsi pouvoir montrer rapidement des résultats, même s’il peut y avoir des « plantages. »

Le point commun à ces exemples est évidemment lié à une perspective business. Il s’agit d’avoir un coup d’avance et d’être réactif. La productivité n’est pas suffisante, notamment avec la mondialisation, y compris dans le secteur des services où le coût d’entrée sur le marché est assez faible. Aussi, l’enjeu est qu’un grand groupe doit devenir aussi réactif qu’une PME. Souvent la question des générations est mise en avant. Contrairement à ce qu’on aurait pu croire, ce problème ne se pose pas. Ainsi au sein de la CIA les agents les plus anciens ont rapidement adopté l’outil ayant une forte expérience d’adaptabilité. Comme le montre l’analyse d’AIIM, l’âge compte peu, c’est la culture qui prime.

Même si une stratégie est difficile à définir, certains points clefs sont récurrents. L’important c’est le réseau social, pour trouver les connecteurs dans l’entreprise. Dans le web 2.0, le document devient un lien vers une personne. On peut rajouter la couche d’activité (process, workflow) et les réseaux géographiques. L’important c’est la circulation, les flux, les liens. Les connecteurs en entreprise sont soient déclarés, calculés ou suggérés à travers des contenus, tags, intérêt, contact, activité, réunion, annuaire…, mais ils existent. L’important est de penser les liens.


schema_reseaux.jpgSource : http://www.slideshare.net/guest237537/presentation-du-25-juin


Et les entreprises françaises dans tout ça ?

En tout premier lieu, comme cela a souvent été dit, il faut développer une culture du droit à l’erreur pour pouvoir se confronter et éviter les effets tunnels pour pouvoir communiquer. Mais il faut aussi :

  • Faire confiance et être relax
  • Avoir un annuaire ouvert, transparent, accessible, sympa
  • Évangéliser, expérimenter (au niveau du comité de direction)

Il ne faut pas oublier de prendre en compte les dimensions individuelles et hiérarchiques. Concernant le retour sur investissement, ce qui compte ce n’est pas la productivité, c’est la pertinence, la rapidité. Il faut évaluer non pas combien cela coûte, mais évaluer le coût de ne pas le faire. Pour les entreprises ayant de forts processus, il faut partir de là pour évoluer. Cela ne sert à rien de vouloir les contourner, au moins pour le démarrage. Le principe qui sous tend tout cela est que : ce n’est pas parce qu’on donne une information, qu’on la perd pour autant…

Merci à Marc et Richard pour ce riche partage d’expérience. Les vidéos de la présentation sont disponibles ici.

Comme le chantait John Lennon, chanson beaucoup entendu durant la conférence de Boston : « it’s easy try it« .