En 2005, Henry Mintzberg, un des papes du écrivait un livre intitulé : des managers, des vrais, pas des MBAÂ
Pavé dans la mare à l’époque, livre remettant en question le fameux MBA des grandes écoles et la voie royale qu’ils ouvrent ensuite dans les entreprises pour devenir un fast tracker, un dirigeant en puissance, un talent….
Le 9 novembre le journal Le Monde explique dans un article que de plus en plus de grandes écoles, mais aussi des DRH et grands patrons sollicitent l’armée pour former ses (futurs) managers. La solution ?
Ce  n’est pas la première fois que les frontières entre le monde militaire et celui de l’entreprise se rapprochent, puisque les militaires interviennent de plus en plus souvent dans les grandes écoles autour des questions de gestion de crise, tandis que d’autres participent à des Executive MBA payé par l’armée. Mais même dans des temps plus anciens, des militaires à la retraite ont intégré le monde de l’entreprise, partageant cette vision qu’un militaire sait commander et donc par la même manager. J’ai du manquer un élément si commander est synonyme de manager. Si l’un est inclus dans l’autre, le second est tout de même plus large. Comme noter n’est pas synonyme d’évaluer.
Mais bon admettons que ces notions soient particulièrement proche, maintenant la question qui se pose est quel type de managers voulez-vous ? Je vais reprendre ici quelques points sur le management et le social business que j’ai déjà abordé.
Tout d’abord au niveau de l’organisation. L’organigramme de la majorité des entreprises est inspiré du fonctionnement militaire. C’est la première chose que l’on apprend quand on fait du conseil en organisation. A ma connaissance cette organigramme, ce mode de fonctionnement pyramidal est toujours en vigueur au sein de l’armée et n’est pas prêt de changer. Je reste donc dubitatif sur le fait qu’un militaire qui promeut ce fonctionnement et qui l’a donc totalement intégré, soit l’agent du changement visant à remettre en partie en cause ce modèle pyramidale (comme cela est en partie le cas dans les entreprises, même si on est loin du réseau). Quand on parle d’intelligence collective, de social innovation, le modèle militaire n’est pas le premier, loin de là , à venir à l’esprit.
Pour poursuivre dans cette voie, il y a l’idée de savoir animer sans hiérarchie dont j’ai déjà parlé. S’il y a bien une organisation ou le décisionnel repose avant tout sur la hiérarchie c’est bien l’armée. Donc je ne vois pas trop en quoi une formation par un militaire va aider à un fonctionnement plus horizontale. De plus, l’idée de la confiance en lieu et place de la discipline est aussi une idée importante. Là encore, il me semble bien que l’armée est un symbole de ce que représente la discipline.
De même, il y a un mantra qu’on retrouve souvent dans les projets social business autour du « lâcher prise », accepter de ne pas tout contrôler, bref perdre en partie le contrôle. Je ne vois pas en quoi l’armée dans son mode de fonctionnement est une réponse à ce type de problématique, puisque là encore elle me semble dans incarner dans son modèle décisionnel  l’opposé de ce type de vision.
Enfin, car il ne s’agit pas non plus de faire une liste à la Prévert qui pourrait être longue, on attend d’un « manager 2.0 » d’être un animateur remettant en question les rapports de pouvoir, visant à promouvoir pour le moins un management participatif. De  nouveau, je m’ettonne que l’on puisse penser qu’un militaire correspond à ce type de portrait.
Au final il ne s’agit pas de dire que toutes les valeurs développées par l’armée ne correspondent pas à ce schéma, comme par exemple la valorisation du collectif qui va dans le même sens, mais je ne crois pas que cela soit suffisant. De même, si en situation de crise les militaires peuvent amener un vrai savoir, le management d’une crise n’est pas le modèle d’un management au quotidien.
C’est pour ces raisons que je crois que les réponses à ces questions de management collaboratif ne se trouvent pas du côté de l’armée, qui à un fonctionnement qui correspond à un certain type de management et d’objectifs, bien différent de la culture collaborative vers laquelle les entreprises semblent souhaiter se diriger. Au final on est encore dans des questions de cultures, et celles-ci sont bien différentes.
C’est pourquoi les écoles et grands patrons qui pensent avoir trouver une réponse à leur problématique managériale se trompent de chemin pour le moins, ou pour le pire de vision.