Les valeurs de l’entreprise sont-elles compatibles avec le management 2.0 ?

La semaine dernière j’étais invité au lancement du livre de Jean-François Claude et Thierry Wellhoff sur L’entreprise en 80 valeurs (merci à Léa et Laetitia pour l’accueil). Il ne s’agit pas ici de passer au crible les 80 valeurs décrites dans le livre (qui ont donner lieu à un classement français et international), mais de revenir sur la vision de l’entreprise autour de celles qui peuvent être centrales dans un projet 2.0 au sein d’une entreprise (là encore il y a eu un choix à faire, ne pouvant faire une liste à la Prévert). Mon choix s’est donc porté sur seulement 4 valeurs :

  • La confiance
  • L’implication
  • L’initiative
  • Le partage

Voyons ce que cela donne.

Le livre pour chaque valeur est construit principalement de la façon suivante :

  1. Une définition de la valeur
  2. Son positionnement dans la démarche managériale
  3. Un exemple sur comment les entreprises expriment cette valeur

La confiance

Comme je l’ai déjà écrit, la confiance est primordiale dans ce type de projet (Management 2.0 : la confiance base du collaboratif). Sans confiance, le collaboratif ne pourra jamais vraiment aboutir. Dans la définition donnée par le livre, la confiance est le sentiment de pouvoir se fier à quelqu’un ou à une institution. Ce sentiment constitue un préalable optimiste et engageant dans la relation  à l’autre. Mais comme le rappel les auteurs dans son positionnement managériale, « la confiance est loin d’être spontanément au rendez-vous des situations de travail ».

En effet le monde de l’entreprise a largement démontré que la confiance même si elle présente dans le discours des entreprises (on retrouve dans l’ouvrage l’exemple de Capgemini ou Generali), elle est loin d’être présente dans la vie des collaborateurs. Faire émerger les conditions de la confiance est un vrai défis pour les entreprises, sinon outils collaboratifs, discours…, l’investissement des collaborateurs ne changera pas.

Cela nous mène à la valeur suivante.

L’implication

Cela signifie que le collaborateur est engagé dans son travail et consent à des efforts sans que cela lui semble injustifié, afin de participer au succès de l’entreprise.

On est loin des process, mais bien orienté sur l’individu et les moyens de reconnaissance. Il est intéressant de noter que dans un classement des valeurs, cette dernière est 47e en France et 25e à l’international (alors que toutes les entreprises claironnent que l’individu est coeur de leur performance). Les entreprises françaises restent attacher à l’idée de performance liées à la hiérarchie et à l’organisation. Il est temps de repenser le « contrat social » de l’entreprise et comme l’a suggéré un rapport, peut-être faut-il surtout indexé le variable des dirigeants sur la responsabilité sociale plus que sur les résultats. Surtout que cette implication aura un impact sur la performance, alors un deal gagnant-gagnant ?

L’initiative

L’entreprise à l’heure actuelle met l’accent sur la règle, la procédure, l’alignement et limite largement la prise d’initiative (cela renvoi dans un sens comme dans l’autre à l’idée de confiance). La prise d’initiative est corolaire au droit à l’erreur qui est contraire souvent aux modes de fonctionnement mis en place au sein de l’entreprise. Cela renvoi aussi à plus d’autonomie (ce qui ne signifie pas l’absence de compte à rendre et surtout donner les moyens de cette autonomie) qui ne signifie pas autogestion.

L’initiative pour beaucoup d’entreprise semble remettre en question l’idée de hiérarchie où chacun est avant tout un exécutant. Peut-être surtout faut-il y voir la remise en question d’un micro-management encore largement présent dans nos organisations et largement contraire à l’idée de collaboratif.

Le partage

Le partage « consiste à mettre en commun des expériences pour que chaque partie concernée enrichisse ses connaissances et ses pratiques… L’esprit du partage suppose de prendre l’initiative de donner ».

On retrouve là assez facilement l’idée de communauté de pratique. Là encore le management va poser question. Combien de fois j’ai entendu le fait que pour pouvoir participer à ce type de projet il fallait le soutien des n+1. La prise d’initiative est encore bridée, le découpage en BU renforce ce côté individuel, chacune étant jugée sur ses résultats en « compétition » avec les autres BU. Pourquoi donner aux autres ? De même l’évaluation est individuelle, pas collective et ne pousse à pas à ce type d’initiative. On en revient à l’effet Whuffie, donner par générosité sans rien attendre en retour, mais l’entreprise encourage-t-elle voir permet-elle vraiment ce type de comportement ?

Une conclusion en deux points :

Les valeurs sous-jacentes à l’entreprise 2.0 sont particulièrement importantes car elles montrent bien que l’on est beaucoup plus sur une problématique culturelle que technologique. Un fossé existe encore à l’heure actuelle, car si ces valeurs sont présentes dans le discour des entreprises (y compris dans des référentiels de management), elles sont souvent loin d’être appliquées au niveau du management (car elles ne renvoient à aucun process de valorisation et reconnaissance pour le collaborateur).

Enfin ce billet étant issu d’un ouvrage, il est logique de conclure sur ce dernier. De par sa construction qui dépasse la simple définition et donne une vision de leur application et positionnement dans la démarche managériale, accompagnée d’exemples, ce livre permet un véritable état des lieux de l’entreprise actuelle et une meilleur compréhension de cette dernière.

Un tour de l’entreprise en 80 valeurs pour parodier un ouvrage célèbre…