Le point de vue du management intermédiaire sur la transformation digitale

Avec un peu de retard, cette étude d’Early Strategies (ce n’est pas la première fois que je vous en parle) a été produite en mai 2016. Je voudrais revenir dessus et sur son propos, le management intermédiaire et la transformation digitale. Elle a été réalisée auprès d’entreprises de plus de 2000 salariés dans le monde entier (même si la France représente 55% des répondants) entre août et octobre2015 sur un échantillon final d’une centaine de personnes (tranche médiane 40-50 ans et 54% d’hommes). Voici les principales leçon de cette étude.

Cette étude porte sur 7 piliers :

  • Adoption de la technologie: les managers intermédiaires adoptent-t-ils les outils digitaux et medias sociaux, et se sentent-ils à l’aise avec?
  • Etat d’esprit: les managers intermédiaires sont cités dans les études pour être plutôt ‘stressés’, et cela est souvent attribué à leur position ‘intermédiaire’. Un phénomène identique se produit-il à cause de la transformation digitale?
  • Statut: y a-t-il un changement dans la manière dont les managers intermédiaires perçoivent leur identité, leurs rôles et responsabilités, leur rôle dans le changement organisationnel, et comment voient-il le futur du management intermédiaire ?
  • Relationnel: les relations humaines et managériales sont elles affectées par la transformation digitale, et comment ?
  • Environnement organisationnel: de nombreux rapports mentionnent un ‘aplatissement’ des organisations, une diffusion de l’auto-organisation et d’autres phénomènes liés à la transformation digitale et à l’ère du 2.0. Cela arrive-t-il réellement, comment, et comment sont impactés les managers intermédiaires ?
  • Changement: les grandes entreprises s’adaptent généralement lentement aux changements de marché, à cause de leur taille et de leur complexité ; par ailleurs, la transformation digitale tend à tout accélérer, et peut même amener des ruptures dans les modèles business. Comment réagissent les managers intermédiaires, comment s’adaptentils ? Et qu’attend-on d’eux à ce sujet?
  • Adaptabilité: les facultés d’adaptation et de confrontation à la complexité de chaque participant corrèlent-elles le reste des réponses ?

Concernant les technologies, même si la transformation digitale est très loin d’une simple question d’outils, la question a été posée et il est intéressant de voir que la messagerie instantanée prend autant de place.

digitauxLes utilisateurs les plus importants dépendent du secteur des ventes et c’est le secteur IT/Telecom qui est aussi le plus consommateur. 46% des managers intermédiaires se considèrent comme doués dans l’usage de ces outils et la majorité souhaite continuer à développer ce savoir faire. Ils sont cependant conscients que l’adoption de ces outils en entreprise ne se fait pas tout seul. La perception d’un manque de reconnaissance de leur implication conjugué avec la nécessité de prendre des initiatives porte les germes d’une possible fracture avec le top management.

exigence

Sur ce qui est de l’état d’esprit des managers et de leur statut, l’étude met en lumière 4 impacts principaux:

  • Une transition d’un management traditionnel vers le leadership
  • Un accélérateur d’efficacité
  • Inconvénients : abondance d’informations et d’outils, en augmentation
  • Une nouvelle préoccupation organisationnelle : gérer la complexité et l’incertitude

Surtout les managers souffrent d’attentes peu claires de la part de leur direction mais aussi la peur de la perte d’un statut et d’une légitimité qui ne sont plus des acquis avec le titre. A l’inverse, ils considèrent que leur efficacité a augmentée de manière importante, en réduisant les temps de réaction, permettant une meilleure compréhension du business, une meilleure analyse des comportements des clients, une prise de décision plus rapide, et un meilleur accès à la même information à tous les niveaux. Du coup, une majorité de participants (63%) pense qu’ils sont plus exposé qu’avant. Cela conduit à une perte d’interaction avec leurs équipes, qui ont moins besoins d’eux pour l’information. Cette exposition et visibilité ont un impact sur les processus de prise de décision.

Donc cette transformation a un impact sur les relations et l’organisation avec en lien directe les compétences.

competences

 

Pour une majorité importante les managers intermédiaires doivent se concentrer sur les compétences humaines (71%) et sur les compétences fonctionnelles (56%) ; les compétences organisationnelles sont les moins mentionnées (15%) et le sont souvent en même temps que les autres catégories.

Le management est un domaine qui retient l’attention de plus de la moitié des participants. Les compétences qui doivent être développées sont :

  • La capacité à déléguer, lâcher prise, donner plus d’autonomie aux équipes, les laisser travailler et collaborer avec d’autres équipes
  • Animer et fédérer les équipes : animer et motiver leurs équipes (mentionné plusieurs fois), « guider et motiver leurs équipes vers un but identique » pour un projet, « gérer les communautés, fédérer les efforts vers un objectif commun au travers de l’expression de buts collectifs clairement expliquées », inspirer les équipes
  • Reconnaître les autres : donner un retour (feedback), avoir des conversations significatives/sérieuses (meaningful conversations), assurer la médiation de conflits, encourager le développement personnel, cultiver une capacité à l’écoute
  • Développer les différentes formes de management : management à distance, management collaboratif et adaptatif, comprendre quand s’appuyer sur un coach digital ou interagir avec les employés
  • Intégrer les différentes générations : prendre en compte les différentes générations, qui ont différents comportements sociaux, différentes attentes et différents usages des outils numériques
  • S’ouvrir à différentes cultures : pouvoir manager des groupes au delà des frontières, guider les équipes en travaillant à distance, guider des équipes de cultures différentes ; être plus multiculturel

On retrouve aussi des compétences de communication, de stratégie, et de savoir être, et pour une infime minorité, rien de nouveau sous le soleil. Mais les principaux défis identifiés sont la culture (25%) avec comme principaux items l’état d’esprit managérial, le manque de transparence et d’ouverture, les approches top-down programmatiques, la communication unidirectionnelle à remplacer par le dialogue et l ‘organisation hiérarchique.

valeurs

Tout cela va donc conduire à un changement et un besoin d’adaptabilité. 38% des managers assimilent plutôt le changement à une mission complexe, qui recouvre une compréhension avancée des problématiques, de l’influence, et une certaine autonomie pour décider d’actions. Le manager intermédiaire est un acteur qui dynamise les équipes et un adopteur précoce. Cela passe par de l’authenticité, du sens et parfois une vision. 30% l’assimilent plutôt à un processus, conçu par un petit nombre de personnes (spécialistes et managers exécutifs) ; il est imposé par la hiérarchie, il y a des tâches à mener à bien (de communication, formation, information, etc.), et le rôle des managers intermédiaires est principalement de transmettre, être exemplaire, et parfois éduquer ou coacher. Certains participants se posent la question de savoir si être un leader du changement fait partie ou non du rôle et des responsabilités des managers intermédiaires.

Au delà du rôle, quel impact sur l’organisation ?

organisation

Si cela permet de mieux s’organiser et se structurer le revers de la médaille peut-être un contrôle plus important aussi et moins « d’humain ». Mais 97% des managers intermédiaires pensent avoir un rôle à jouer, notamment en tant qu’agents du changement mais aussi pour 85% à préparer un nouvel modèle économique lié à l’upérisation en cours ou à venir.

Cette longue étude de 52 pages de qualité permet vraiment d’appréhender la vision des managers intermédiaires, je viens d’en donner un petit aperçu, et si vous voulez en savoir plus, je vous invite à contacter Early Strategies.